Exploser la dette ! par Damien Millet (février 2001) Extrait de la Lettre d’attac 45 n°7, février 2001

Depuis la crise de la dette de 1982,
due à l’envolée des taux d’intérêt, le
Tiers-Monde est saigné à blanc. Les
institutions financières internationales
(FMI, Banque Mondiale), les Etats du
Nord et les banques privées ont
déployé tous leurs efforts pour sauver
le système financier international, en
rendant la dette tout juste soutenable
pour le Sud (et non en le libérant de
ce fardeau qui freine tout projet de
développement). Par l’intermédiaire
des plans d’ajustement structurel
(P.A.S.), avec le soutien des élites locales,
ils ont littéralement pris le
contrôle des économies dites « en
développement » , leur imposant des
privatisations massives, une réduction
drastique des dépenses sociales, une
ouverture totale aux capitaux
étrangers, et une production agricole
toute entière tournée vers
l’exportation.

La situation est devenue à ce point
intenable qu’en 1996, est née l’initiative
PPTE (Pays Pauvres Très Endettés), qui
devait permettre un allègement des
dettes de 41 pays très pauvres et très
endettés, sous certaines conditions
strictes de docilité politique et
économique. Sous l’impulsion du
mouvement Jubilé 2000, fort de ses 17
millions de signatures remises lors du G7
de Cologne en juin 1999, les conditions
ont été quelque peu assouplies et des
chiffres époustouflants ont été avancés
 : 80% d’allègements, puis 90%, voire
100% de la part des états occidentaux.
Mais ces effets d’annonce ne résistent
pas à l’analyse des données disponibles,
car ce pourcentage porte évidemment
sur une partie infime de la dette totale.

Actuellement, seuls 22 pays ont été
déclarés éligibles pour cette initiative, et
les montants concernés pour ce
présumé allègement sont bien maigres :
moins de 15% de la dette de ces 41
pays, soit 1,5% de la dette totale du
Tiers Monde. Cette dette du Tiers-
Monde continue d’augmenter et
contrairement à ce qu’on pourrait croire
à cause du matraquage médiatique,
comme lors du récent sommet de
Yaounde de janvier 2001, le problème
de la dette n’est absolument pas résolu.

En décembre dernier, à Dakar,
deux conférences internationales pour
l’annulation de la dette et l’élaboration
d’alternatives de développement ont
permis, grâce à une représentation
panafricaine unique en son genre, de
dégager un large consensus en matière
de stratégies Nord-Sud. Le sommet de
Porto Alegre qui vient de se dérouler a
encore fourni une tribune excellente à
tous ceux qui se battent pour obtenir
une réelle annulation de la dette des
pays du Tiers Monde. Le relais
médiatique fut conséquent (dont Daniel
Mermet sur France Inter bien sûr),
et même des médias peu suspects de
citoyenneté aggravée ont rendu
compte de l’événement : on a pu
entendre Eric Toussaint aussi bien sur
France Info que sur Radio BFM par
exemple... Porto Alegre s’est imposé
comme l’équivalent citoyen du sommet
de Davos. En plus ouvert, en plus coloré,
en plus chaleureux.

Damien Millet, Attac 45.